Le parcours atypique d’un artiste au service des autres

Punk à chien, jongleur, comédien, chanteur et formateur : Arnaud Guibert a bien roulé sa bosse avant de s’installer à Saigon en mars 2019. Il vient de lancer une série d’ateliers de développement personnel à travers la musique et le théâtre.

« Je crois profondément aux capacités des gens et donc ça les autorise à se libérer et à faire des choses incroyables. » Cette phrase résume la philosophie de vie d’Arnaud, ancien SDF devenu artiste et formateur suite à la rencontre providentielle d’un jongleur de rue.

Une jeunesse rebelle

Arnaud mène une enfance chaotique rythmée par les fugues. A quinze ans, il est envoyé dans un lycée expérimental par le directeur de son collège, qui le juge inapte à poursuivre une scolarité normale. Il y passe deux années de débauche. A sa sortie du lycée, ses parents le poussent à passer un C.A.P d’imprimerie. Arnaud démissionne au bout de trois jours et rejoint un groupe de punks à chiens à Nantes. 

© Schiller River club

« J’aimais bien leur absolue liberté. J’étais très rebelle, très en colère. J’ai passé quelques années dans la rue. J’ai fait la manche au début. L’ego en prend un coup parce que tu te retrouves à tendre la main sans rien donner. J’étais vraiment dans une période d’ombre profonde. »

Un jour, Arnaud tombe sur un livre qui explique que l’on peut changer de vie en transformant nos pensées négatives en pensées positives*. C’est un électrochoc. Il décide d’intégrer ce nouvel état d’esprit dans sa vie quotidienne et prêche avec enthousiasme les bienfaits de la pensée positive. Ses amis de la rue le surnomment Positive Man. « Je crois qu’il y avait un petit bout de moi qui voulait vivre quand même, malgré le fait que je me défonçais énormément. » Un an plus tard, il rencontre un jongleur de rue qui fait sauter un bâton sur deux baguettes. Fasciné, Arnaud lui demande s’il peut lui apprendre quelques tours. « Ça a été le début de mon ouverture de l’ombre vers la lumière et le début de mon métier de formateur, parce qu’au bout de deux jours, je connaissais trois passes de jonglage et je me suis dit “si je peux, la Terre entière le peut et donc je dois leur transmettre !” ».

La passion de l’enseignement

Arnaud lâche progressivement ses petites combines pour se consacrer au jonglage, qu’il pratique huit heures par jour. Un metteur en scène de théâtre de rue le voit jongler et l’embauche dans sa troupe. Cet événement déclenche sa sortie de la rue. Il anime ensuite des ateliers de jonglage et d’attelage au sein d’une association qui organise des séjours touristiques en roulotte. Deux ans plus tard, il monte son premier spectacle solo, dans lequel il mélange jonglage, théâtre et chant. « C’était une pièce de théâtre un peu absurde que j’ai tournée grâce au réseau associatif Familles Rurales. J’ai eu vingt dates dans l’été. C’était un truc insensé ! Je me suis acheté ma première fourgonnette 4L et je suis parti faire ma tournée. Après, tout s’est enchaîné. »

Pendant vingt ans, Arnaud chante, joue et anime des ateliers artistiques dans tous types de lieux, de préférence dans les environnements dans lesquels il sent que la création artistique peut apaiser la souffrance. Il aide des jeunes de banlieue à composer leurs propres morceaux de slam et anime des formations auprès de salariés d’entreprise, de prisonniers et de patients souffrant de problèmes psychiatriques légers. Son expérience en milieu hospitalier le bouleverse. « Il y avait une sorte d’immédiateté incroyable dans le travail. Ils y allaient à fond, très rapidement. C’était incroyable et merveilleux. Le fait de se retrouver à créer d’un coup, ça leur permettait de se reconnecter à un petit bout de lumière qui subsistait et de réaliser qu’ils n’étaient pas complètement éteints. » Au terme de dix années en psychiatrie, Arnaud ressent le besoin de prendre du recul par rapport à son activité de formateur et de l’approfondir. Il se forme pendant deux ans à diverses disciplines des sciences humaines, telles que la PNL et le coaching créatif.

En 2016, Arnaud vend tout ce qu’il possède en France et se lance dans un grand voyage à travers le monde. Il embarque avec sa compagne sur un cargo porte-conteneur, parce que « sur un bateau, y’a rien d’autre à foutre qu’être avec soi, sans internet et sans écran ». Pendant son périple, il passe trois mois dans un centre de yoga, de méditation et d’ateliers créatifs situé à 150 kilomètres au nord-est d’Ho Chi Minh Ville**. Il y anime quelques formations à la demande de la gérante du centre. Séduit par cette expérience, il décide de revenir vivre au Vietnam en 2019.

© Schiller River club

 

La création d’ateliers thématiques

Depuis le début de l’année 2020, Arnaud anime des ateliers de chant et de théâtre avec l’objectif de guider les participants dans l’exploration de leurs émotions, de leur créativité et de la relation qu’ils entretiennent avec eux-mêmes et avec les autres. Ces formations collectives ou individuelles s’adressent aux particuliers, aux formateurs, aux artistes et aux entreprises. Elles se déroulent en français, en anglais et en vietnamien.

La motivation principale d’Arnaud lors de ces formations est d’aider les participants à transformer leurs croyances limitantes vis-à-vis d’eux-mêmes et à redécouvrir les compétences innées qu’ils ont parfois délaissées en devenant adulte. « Toutes les compétences que je transmets à travers mes ateliers sont des compétences qu’on a expérimentées enfant : la spontanéité, la relation simple sans masque social, la curiosité du monde, l’apprentissage sans tabous, etc. »

© The Dom Dom healing garden

 

Il y a 25 ans, Arnaud reprenait confiance en lui et sortait de la rue grâce à la pratique artistique. Aujourd’hui, cet homme déterminé de 46 ans s’appuie sur les apprentissages de sa vie mouvementée pour accomplir sa vocation : aider les autres à mieux se connaître et à se transformer positivement par l’art.

* Pensez et guérissez, Kurt Tepperwein, 1984

** Xứ Sở La Vie Est Belle

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